Photo de couverture @Jason Hummel.
Michael “Bird” Shaffer, le drôle d’oiseau et joyeux ambassadeur Black Crows de la première heure, nous livre son récit du premier Ski Sauvage à Tahoe, en Californie. Entre mysticisme montagnard et exubérance fraternelle, prenez place aux côtés du Bird pour un vol habité au-dessus de la Sierra Nevada.
Depuis qu’il a avalé la pilule bleue de Chamonix, il ne pouvait plus revenir en arrière, mais avait-il oublié les liens qui l’unissaient aux montagnes nord-américaines ? Voici l’histoire d’un souvenir qui confirme que si l’on suit son cœur, des portes commencent à s’ouvrir et, que si l’on aime la montagne, la connexion sera là… pour toujours.
Longtemps, j’ai snobé Tahoe. Pourquoi diable irais-je là-bas alors que la frontière de la Colombie Britannique et ses immenses massifs se trouvent à quelques encablures de chez moi ? Sans compter Chamonix qui me chante son amour printanier chaque année.
Heureusement, le devoir m’appelle car le programme Ski Sauvage a besoin d’un coup de pouce. Le plan de vol du QG est d’apporter mon énergie et d’encadrer des sessions Ski Sauvage en Amérique du Nord avec une première étape importante à Tahoe, Californie. Une randonnée figure en tête de liste au Mont Rose. Un endroit encore sauvage qui incite les gens à adopter un rythme de vie plus calme au milieu d’une nature préservée et d’une neige magnifique. La connexion Bird Freebird s’est révélée non seulement avec la nature, mais aussi entre skieurs. Le haut pouvoir énergétique de cette zone nous a tous accueillis.
Dès le départ, l’univers nous a pourvus le guide de la situation, Tim Dobbins, un ami rencontré à Chamonix 20 ans plus tôt. Il a perfectionné son art et nous offre cette fenêtre par laquelle nous pouvons tous nous glisser : un panorama à 350 degrés strié de petits goulets gavés de poudreuse et un incroyable sentiment de liberté. Ce jour-là, avec ce tout premier événement de ski de randonnée Black Crows en Amérique du Nord, nous avons marqué l’histoire.
Tim et son collègue Pete ont bien bossé pour faire la trace. De mon côté, je pouvais me concentrer sur le groupe et insuffler de l’énergie quand quelqu’un prenait du retard. Encadrer une équipe de 13 skieurs de différents niveaux n’est pas une mince affaire, mais nous sommes arrivés au sommet de la crête au complet. Là-haut, nous nous sommes félicités les uns les autres avant de contempler le magnifique panorama qui se dévoilait devant nous comme un grand livre d’histoire. Puis, telle une nuée de corbeaux nous avons fondu sur la planche de charcuterie, de fromage fort et de crackers.
Cette journée de grand beau nous a permis de nouer de belles amitiés et, pour certains des jeunes corbeaux, d’éprouver une forte impression. Ces connaissances leur serviront à atteindre de nouveaux sommets. La randonnée permet d’expérimenter ce lien que la liberté en montagne favorise et j’encourage tous ceux qui ont une bonne base en ski à se faire pousser des ailes et à explorer leur pleine envergure dans les montagnes. Les sourires et les accolades en fin de la journée en dirent long.
Rattrapé par la réalité, mes idées préconçues d’un Tahoe exubérant et frénétique sont passées à la trappe. À la place, par la grâce des montagnes, je me suis rattaché à cette tribu de skieurs qui remontait à 1995 (c’est à cette époque que les frères Cali m’ont emmené pour la première fois à Chamonix). Puis, il y a eu cette deuxième session Ski Sauvage à Alpine Meadows où Kai et Zack, deux jeunes gars qui avaient randonné avec nous au Mont Rose, sont revenus et nous ont apporté leur super énergie. Voilà qui mettait en évidence la vivacité de cette fraternité montagnarde parmi la jeune génération. Cela m’a aussi conforté dans mon rôle d’ambassadeur, ce que l’on nommait autrefois, guide d’amour.
Après l’intensité de la première journée de Ski Sauvage avec cette joyeuse bande de skieurs, nous avions un jour de repos avant la session d’Alpine Meadows. Il y avait de la neige fraîche et j’avais envie de remettre mes freebirds en action. Cependant, le manteau neigeux était fragile avec un mille-feuille de vieilles couches, des dragons à l’affût et l’annonce d’une sérieuse avalanche sur le domaine de Pallisades. Tout cela a mis un frein à mes velléités, mais ne m’a pas découragé.
Mes partenaires ont jeté l’éponge et j’ai commencé à douter. Mais, je savais que Tim Dobbins devait emmener un client à l’endroit où il nous avait guidés la veille et qu’il pourrait éventuellement me rejoindre pour une balade dans l’après-midi. Je me suis réveillé tôt et j’ai démarré “Will shred Betty”, mon fidèle van de location. Un magnifique lever de soleil a illuminé le lac Tahoe. De retour au sommet, j’ai profité d’une vue splendide sur les immensités désertiques du Névada qui viennent se jeter sur les sommets enneigés de la Sierra. J’ai fait quelques descentes solos à travers les arbres. La neige était délicieusement légère, le paysage fantastique et j’évitais de me mettre en danger sur des pentes trop raides.
Puis, fidèle à sa parole et réglé comme une horloge, Tim m’a passé un coup de fil. Il avait terminé sa journée avec son client, un cardiologue pédiatrique, et était prêt à m’embarquer pour une virée particulière.
La montée en peaux a été un moment de bonheur. Nous avons pu converser à loisir, nous remémorant nos années chamoniardes et la chance d’avoir vécu de tels moments. Nous avons aussi pu mesurer notre chance d’être toujours là et de faire ce que nous aimons le plus. J’ai appris que Tim avait une femme camerounaise et deux joyeux enfants. Certaines choses avaient changé, Tim était devenu père de famille et moi, j’étais devenu plus sage. Du moins, j’osais le croire. Arrivés au sommet, tandis que nous enlevions les peaux de phoques et nous préparions à la descente, notre communion était totale. L’amour rayonnait et nos choix de vies prenaient tout leur sens. Le coucher de soleil sur cette magnifique poudreuse se conjuguait avec l’émotion de notre discussion à cœurs ouverts.
Un grand merci à Mikey Hovey qui a organisé et géré le voyage, à Casey Jillson qui a apporté sa touche magique pour rendre le séjour encore plus chaleureux. Un grand merci également à tous ceux qui se sont inscrits au Ski Sauvage et qui ont pris plaisir à skier avec nous.
Merci à Tahoe et ses habitants, vous avez su garder la flamme.
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