Par amour du ski : la Colombie-Britannique par Sølve Sundsbø

Dans le cadre de Fashion Eye, une collection de livres de photographies édités par la marque de maroquinerie et de prêt-à-porter Louis Vuitton, le photographe norvégien Sølve Sundsbø a réuni une série de quarante-et-une images prises au cours de treize séjours dans le massif des Selkirk en Colombie-Britannique. Un livre aux images mystérieuses et magiques, comme si la la nature nous permettait d’écouter quelques musiques secrètes.
Il est suffisamment rare d’appréhender l’univers du ski à travers le regard d’un photographe spécialisé dans l’univers féminin pour qu’on s’y intéresse, mais quand ledit photographe chevauche des Black Crows et fréquente l’aristocratie des skieurs vagabonds londoniens, cela a le don de chatouiller notre curiosité. Sølve a accepté de répondre à quelques questions et nous a autorisé à publier un avant-goût de cet ouvrage ainsi que quelques photographies de son travail dans la mode.

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Black Crows : Originaire d’un pays du ski, quelle discipline pratiquais-tu et quelle importance avait le ski dans ta famille ?

Sølve : J’ai commencé le ski de fond à 15 mois. En Norvège, surtout si vous habitez à la campagne, le ski est une activité banale. Le ski nordique était prédominant quand j’étais petit, mais pour beaucoup de Norvégiens c’est encore le cas. Le ski alpin a toujours été secondaire par rapport aux disciplines nordiques. Le saut à ski, le ski de fond et le biathlon représentaient le “vrai” ski ; ce qui est assez ironique si l’on considère que slalom est un mot d’origine norvégienne, de slad « incliné » et de laam « trace que laisse un objet que l’on traîne, que l’on tire ». Le virage que l’on pratique aujourd’hui est le virage Christiana (l’ancien nom de la capitale Oslo), il a remplacé le virage Télémark (du nom d’un comté en Norvège).

Black Crows : Est-ce que tu as fait de la compétition dans ta jeunesse ?

Sølve : J’ai pratiqué la compétition en ski nordique jusqu’à ma prime adolescence et puis j’ai définitivement arrêté. Ensuite, je n’ai pratiqué le ski nordique qu’avec des amis et dans les montagnes, loin des tracés conventionnels. À cette époque, j’étais déjà sérieusement intéressé par le ski alpin, mais pas d’un point de vue compétitif, simplement de manière récréative et sans entraînement spécifique.

Knut Bentzen

Black Crows : Concernant la photographie, quel a été ton parcours et comment en es-tu venu à la photographie de mode ?

Sølve : L’un des déclics de ma carrière a été le ski et les concerts. On emportait toujours un appareil photo pour prendre en photo nos sauts et autres pitreries. On lisait Åka skidor et le magazine Powder et on rêvait en grand. La neige étant blanche, votre sujet vous saute aux yeux. Et dans les concerts, votre sujet surgit des ténèbres. Je pense que cette manière réductrice de concevoir des images m’a interpellé et, à maints égards, est restée ancrer en moi.

Black Crows : Quel est le lien entre le jeune skieur venant d’un petit bled en Norvège et le photographe qui parcourt le monde ?

Sølve : Je n’aurais sans doute jamais commencé à prendre des photos si ce n’était pour les magazines de ski et les magnifiques photographes qui travaillaient pour eux. Je rêvais de ski et ce rêve était nourri par la photographie.

Sølve Sundsbø

Black Crows : Est-ce que tu trouves de l’inspiration dans le ski ou les montagnes pour ton travail créatif ?

Sølve : Oui c’est le cas. La nature m’inspire, qu’il s’agisse de montagne ou de micro-organismes marins. La créativité de la nature est quasiment infinie. Le ski me vide l’esprit et la nature l’emplit.

Black Crows : Est-ce que tu as construit ce livre pour ce projet ou était-ce déjà en gestation ?

Sølve : Ce livre s’est construit à partir de plusieurs années d’images prises sans aucun autre objectif que ma curiosité et mon plaisir. J’utilise un petit boîtier compact et mes images sont prises soit en montant, soit au sommet, ou en bas de la montagne. Entre-temps, je fais surtout du ski et ne prends pas trop de photos.

Quand j’ai commencé à dialoguer avec les responsables de l’édition, j’ai parcouru mes archives et on s’est engagé dans une approche abstraite et minimale. La quasi-absence de l’humain semblait la bonne démarche. Le résultat ressemble fort à un endroit où il n’y a pas d’êtres humains. Comme s’il s’agissait d’une autre planète.

Sølve Sundsbø

Black Crows : Tu prends toujours un appareil avec toi quand tu pars skier ?

Sølve : J’emporte toujours un appareil. Mais maintenant c’est surtout pour prendre des photos des enfants.

Black Crows : Comment perçois-tu le travail des photographes de ski ?

Sølve : J’admire les photographes qui ont choisi de travailler avec les skieurs. Un rude métier pour des gens solides. Le poids du matériel, les conditions, etc etc. Pour ma part, je crois que j’ai choisi de le faire d’une manière différente, peut-être plus personnelle.

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