Black Crows : où habites-tu pendant l’hiver et quelle est ton activité principale ?
Peio : Je vis aujourd’hui à l’année sur la plaine de Nay au pied d’une petite vallée sauvage, la vallée de l’Ouzom. C’est pour moi un camp de base vraiment sympa car il me permet de rejoindre facilement les vallées des Hautes Pyrénées comme celles des Pyrénées Atlantiques. J’ai bossé comme pisteur et accompagnateur pendant de nombreuses années. J’ai la chance aujourd’hui de pratiquer la montagne toute l’année pour mon plaisir. Je bosse en photos et sur des topos pour des magazines et des collectivités. Je bosse parallèlement avec des jeunes de quartiers notamment sur des projets de découverte de la nature et de l’environnement montagnard.
Black Crows : Tu peux nous en dire plus sur ton activité d’encadrement des jeunes ?
Peio : Ce boulot consiste à mobiliser des jeunes de quartiers pour travailler avec eux sur des thématiques telles que le réchauffement climatique (projet au Spitzberg), la déforestation dans les Pays du Sahel (nord Mali), les problèmes d’irrigation au Maghreb (Maroc) ou encore des thématiques liées au sport (découverte des sports de glisse, initiation à l’alpinisme, ascension du mont Blanc ou du Toubkal au Maroc). Tous ces projets m’ont permis de bien voyager et de partager d’excellents moments avec des jeunes qui n’étaient pas vraiment destinés à se retrouver un jour sur la banquise arctique ou au Sahel…
Black Crows : quel est ton rayon d’action depuis ton camp de base ?
Peio : Je skie pas mal en vallée d’Ossau, une vallée à laquelle je suis particulièrement attachée depuis que je suis gamin. Cette vallée offre de super spots en piémont comme en fond de chaîne. Maintenant, mon plaisir est de bouger le plus souvent possible avec de bons potes en fonction des conditions d’enneigement. On s’adapte facilement aux perturbations. C’est l’avantage de glisser dans les Pyrénées, tu peux facilement rejoindre l’ouest ou l’est de la chaîne. Et puis l’Espagne est toute proche, il est facile de basculer de l’autre côté de la frontière pour aller rendre visite aux potes espagnols, partager quelques traces ensemble et finir la journée autour de quelques tapas et bières locales.
Black Crows : Comment décrirais-tu le ski dans les Pyrénées ? Est-ce que c’est comparable avec d’autres montagnes que tu aurais parcourues à travers le globe ?
Peio : Décrire le ski dans les Pyrénées ? Je n’ai pas envie de trop m’étendre sur la question, ça serait un coup à ce que tout les alpins débarquent chez nous ! Non sérieusement, le ski dans les Pyrénées offre un très beau champ d’action. C’est un ski sauvage, authentique, ou si tu te creuses un peu la tête tu peux te retrouver quotidiennement seul sur des spots magnifiques. Les terrains sont variés avec de belles pentes herbeuses en piémont taillées pour du ski tranquille et de très beaux versants nord au cœur du massif qui te permettent de te lancer dans de belles courses. Lorsque l’on bascule de l’autre côté de la frontière tu retrouves un paysage vraiment différent, plus aride mais qui offre également de super alternatives. On considère souvent les Pyrénées comme un massif de seconde zone, avec un enneigement difficile… Pourtant lorsque je fais, chaque année le bilan de ma saison, je m’aperçois que cette multitude d’options que nous offrent les Pyrénées fait de notre massif un lieu vraiment extra pour la pratique du bon ski… J’ai eu la chance de pas mal voyager en ski et je suis toujours aussi content de retrouver notre massif du fait de sa singularité et de son authenticité…
J’aurai du mal à comparer les Pyrénées à un autre massif. En revanche, ce sont des montagnes où la présence de l’humain est très importante, les bergers, les gardiens de refuge, les paysans qui exploitent toujours les terres, je crois que ce sont ces personnes qui rendent notre massif singulier et attachant. Tu retrouves cette notion de « peuple de montagne » dans de nombreux massifs comme le petit Caucase en Géorgie, dans le massif du Kaçkar en Turquie, au Maroc dans l’Atlas ou encore en Crète où nous avons eu l’occasion de passer du bon temps avec des bergers locaux… Pour moi, ce sont ces personnes qui rendent le ski si puissant dans ces massifs… Le ski n’est pour moi qu’un super prétexte pour faciliter la rencontre de ces hommes qui font la montagne.
Black Crows : Quel massif recommanderais-tu à un randonneur qui voudrait découvrir les Pyrénées ?
Peio : Je lui dirai de venir découvrir la vallée d’Ossau et plus précisément le haut Ossau. Et si ce randonneur est sympa, je l’emmènerai peut-être même dans mon jardin secret sur les versants nord du pic du Midi d’Ossau… Mais bon seulement s’il est vraiment sympa…
Black Crows : Quelle est l’évolution des chutes de neige et des conditions ces dernières années ?
Peio : Je pratique uniquement la rando ce qui rend mon analyse pas totalement objective. En effet, lorsque tu pratiques le ski de montagne, tu es sans cesse à la recherche du versant où la neige sera la meilleure à skier… Du coup, honnêtement, on arrive le plus souvent à très bien tirer notre épingle du jeu… Je suis incapable de te dire que j’ai connu une mauvaise saison ces dernières années. Lorsque je regarde la saison dernière par exemple, je m’aperçois que l’on s’est vraiment fait super plaisir toute au long de l’hiver ! Je sais en revanche que des stations comme Cauterets ont connu des enneigements records avec des hauteurs de neige de près de 6 mètres en 2013…
Black Crows : Qu’est-ce que tu as pensé de la première édition de la Sentinelle ?
Peio : Lorsque Bruno m’a contacté pour évoquer cette idée qui lui trottait dans la tête, j’ai de suite pleinement adhéré. Dans une société où tout est lié à la compétition et la performance, quel plaisir d’imaginer que des skieurs venant de partout sont prêts à se retrouver avec comme seule idée de partager « un voyage » au cœur d’un massif. Bruno est un gars dans lequel pas mal de skieurs de montagne se retrouvent car il symbolise l’« esprit montagne ». Je pense que tous les gars présents sur la Sentinelle étaient parfaitement en phase, vraiment heureux de se retrouver sur un tel rassemblement. La météo a été capricieuse pour cette première édition mais au final comme souvent dans les Pyrénées, les participants ont eu droit à une journée de rêve.
Black Crows : Comment a été choisi l’itinéraire ?
Peio : À la base, après avoir bien discuté avec Minna et Bruno, j’avais imaginé un parcours vraiment exigeant à cheval entre la France et l’Espagne. Un bel itinéraire permettant de découvrir l’envers du cirque de Gavarnie. On avait réfléchi à un itinéraire qui faisait la part belle à la montée comme à la descente, un parcours « montagne » bien dans l’esprit de la Sentinelle. La montagne en a décidé autrement en déposant un gros paillât de neige le jour J. Un bel itinéraire de repli a alors dû être imaginé pour permettre aux gars de découvrir le secteur en sécurité.
Black Crows : Quelle place prend la photo dans ta vie de skieur aujourd’hui ?
Peio : Je prends vraiment plaisir à faire de la photo de ski. C’est une approche qui me plaît car elle implique une belle complicité avec le rideur que tu shootes. Il m’est aujourd’hui difficile d’envisager une sortie sans mon boîtier… Les gars qui m’accompagnent font preuve d’une belle patience et comprennent aujourd’hui les situations que je recherche.
Black Crows : Tu es ambassadeur depuis longtemps, quel est ton jugement sur l’évolution de la gamme black crows, est-ce que cette évolution a aussi fait évoluer ta pratique ?
Peio : Cela fait 9 ans que je glisse sur des Black Crows. La gamme était à l’époque beaucoup plus restreinte. Je ridais avec un Orb en rando et les skieurs que je croisais dans les Pyrénées hallucinaient en me croisant avec 90 au patin… J’ai suivi le développement de la marque en profitant chaque saison des nouveaux jouets mis à disposition. L’arrivée du Navis Freebird nous a offert un ski super polyvalent qui, pour moi, est excellent dans toutes les conditions. Maintenant je dois avouer que mon plus fidèle compagnon depuis trois saisons est un Atris monté en Plum qui pour moi est le ski le plus sympa qui m’ait été donné de rider. Je trouve ce ski super joueur et fiable dans toutes les conditions ! Je l’utilise au quotidien pour des dénivelés allant jusqu’à près de 2000 positifs.
Black Crows : Tu aurais une recette de pays ? Bruno parle de garbure, c’est bon ça ?
Peio : Malheureux ! Évidemment que c’est bon ! C’est une soupe que l’on mange dans toutes bonnes familles pyrénéennes. On la fait à base de choux, de pommes de terre, de haricots tarbais et de confits de canard et de jarret de porc… La particularité de la garbure est qu’elle se bonifie au fil des jours en la faisant mijoter !
Connaissant Bruno, il a dû te parler de Garbure, mais surtout de Chabrot, lorsque à la fin du repas, tu verses un peu de vin rouge dans ton assiette pour finir ta soupe… Ça, c’est les Pyrénées !