La Cité de l’Océan de Biarritz : une vague en plein ciel.

Entre montagnes et océans, Maxence Gallot témoigne de sa passion pour les traces éphémères de l’homme sur les surfaces naturelles. Il nous livre ici un récit sur la Cité de l’Océan de Biarritz illustré par ses soins avec la collaboration de Greg Moyano.

Maxence Gallot

Œuvre des architectes Steven Holl (N.Y.) et Solange Fabião (Brésil), associés à l’agence Leibar & Seigneurin, la Cité de l’Océan de Biarritz est destinée à la connaissance et au respect de l’océan. Inauguré en 2011, ce bâtiment tout en formes convexes et concaves rappelle l’onde limpide que les marins et les surfeurs guettent avec crainte ou avidité. Conçu comme un trait d’union entre ciel et océan, son toit, telle une houle en formation, est percé d’un bowl où les skaters se retrouvent pour investir l’espace public.

Entourée de montagnes, battue par les embruns, Biarritz est adulée pour ses atouts au coefficient bien-être. Pourtant, en s’écartant un peu de sa bourgeoisie et de ses rues mondaines, on trouve un cœur de passionnés qui scrutent la houle, skatent les rues et transpirent quand les conditions ne permettent pas de se jeter à l’eau. Berceau de la culture surf en Europe, la ville respire depuis le début des années 1950, au rythme de l’océan. Cosmopolite et inventive, son modernisme se manifeste également au travers de son architecture avec des bâtiments s’inspirant de l’environnement et des vagues. La Cité de l’Océan est le reflet de cette audace qui bouscule les convenances provinciales.

La cité de l’Océan, c’est ce géant brut minimaliste et d’inspiration nippone dont l’éclat brille par son ingéniosité aux abords de la plage de la Milady. La géométrie de ses formes donne vie à une vague brute, aussi bétonnée que vivante. S comme Skate ou Snowboard, S comme le serpenté de la courbe idéale, S comme un mode de déplacement au-dessus de cet espace transparent. Il est rare de pouvoir skater sur le toit d’un bâtiment et, si l’interdiction prévaut, certains goûtent parfois à ce fruit défendu qui donne une saveur si particulière à la glisse au cœur de l’espace public.

Greg Moyano

Entre l’étage supérieur et l’étage inférieur, deux univers cohabitent. En bas, un musée océanique permanent ouvert au grand public, lieu de conférence ou expositions photographiques de surf et festivals en tout genre. En haut, un toit rauque aux allures de skatepark raffiné. Et c’est finalement l’étage supérieur qui a pris le dessus au regard de la liberté, face à l’océan de possibilités du dessous. La vert’ de la Cité de l’Océan est rapidement devenue un « melting potes de toutes boards ». Elle permet à des passionnés de venir skater le bowl, dropper la rampe illégalement et partager des instants de glisse. Il fut même possible de rider lorsque la neige recouvrait la structure en cet hiver 2018 de folie. Fin février, le snowboardeur Français Mathieu Crepel s’est ainsi permis quelques drops enneigés au bord de l’océan.

Quand le coucher du soleil éclaire les formes de cette vague immobile, les matériaux se dévoilent et l’œuvre devient interactive entre l’espace et les hommes. Ici, la performance architecturale et humaine ne font qu’un. Lorsque le visiteur y voit un monument architectural épuré invitant à la réflexion, le rideur veut laisser son style et sa vision s’exprimer. Pour lui, les formes s’observent. Il aime faire corps avec le mouvement du toit car tout réside dans l’interprétation de la courbe.

Maxence Gallot

L’océan, le vrai, est à deux pas de ce lieu magique. L’iode marin s’y dépose et on s’y prélasse des heures durant. Les diagonales se confondent entre la fluidité du monument et le grondement des vagues qui frappent au loin. Cette arène ouverte sur l’horizon rassemble curieux et passionnés au sein d’un espace public, faisant fi de la tendance de notre société à tout restreindre et réglementer. Sur le bitume on ne fait pas sa trace, on détourne l’architecture et on s’approprie l’espace urbain. On y cultive l’insouciance de la glisse. On y puise l’essence de l’imagination pour se libérer des carcans de l’ordre social. Longue vie à la cité.

 

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