Le ski est-il désormais dicté par nos compétences sur les réseaux sociaux ?

Le crow Lukas Ebenbichler s’interroge sur l’emprise des réseaux sociaux dans le ski professionnel. Une question récurrente que personne n’ose trop soulever, au risque de devoir inspecter sa propre pierre et finir par la précipiter dans la vacuité numérique.

Pour moi le ski est un moyen de m’exprimer et d’échapper à la routine et au stress du quotidien. Le ski, c’est aussi l’opportunité de me rapprocher de la nature et d’explorer les environs. Pourtant le ski ce n’est plus seulement ça, mais c’est aussi notre réactivité à utiliser des outils comme Instagram, Facebook ou Twitter.

Aujourd’hui, un skieur ne semble déterminé que par le nombre d’abonnés et de pouces tendus vers le haut qu’il obtient dans les minutes qui suivent une publication. Plus vous avez de pouces et d’abonnés et plus vous devenez attractif en termes de sponsoring. Cela me rend dingue parce que moi aussi j’en veux toujours plus. Est-ce désormais la seule manière d’exister ?

Autrefois, les gens étaient équipés parce qu’ils étaient à la fois super bons skieurs, mais aussi communicatifs et toujours actifs en montagne pour présenter les produits. Vous étiez sponsorisé parce que vous étiez bon et non parce que vous aviez des milliers d’abonnés sur Instagram et que vous saviez manier Photoshop et compagnie.

Bien sûr, les réseaux sociaux font désormais partis du jeu, et si vous voulez continuer à vivre de votre passion, il faut bien se connecter d’une manière ou d’une autre. C’est très sympa de poster des photos de vos dernières aventures ou de partager des histoires, mais je trouve ça flippant d’être totalement défini par ses abonnés, ses pouces et autres trucs du genre.

Les skieurs d’aujourd’hui sont plus ou moins des blogueurs : on blogue sur nos aventures, on montre à quel point tout est magnifique même si ça ne l’est pas, on emmerde nos potes pour une photo afin d’alimenter nos réseaux, nous achetons sans cesse du matériel digital pour sortir des clips ou des photos hallucinantes simplement pour la jouissance du flux que cela créera et pour le donner gratuitement à nos sponsors. N’est-il pas ?

Alors est-ce qu’on passe des heures et des heures à faire ces trucs simplement pour avoir d’autres trucs gratuits ? Mais alors comment vit-on ? Comment peut-on en tirer profit ?

En réalité, nous oublions la raison pour laquelle nous skions et parcourons la montagne : mais parce que nous adorons ça, parce que nous sommes bons à ça et parce que nous n’imaginons rien d’aussi jouissif. Les gens qui ressentent ce genre de choses et qui vivent de cette manière sont bien plus précieux que des gens accolés à leurs milliers d’abonnés qui iront vers les plus offrants sans égard pour le reste. Celles et ceux qui vont en montagne par amour sont très précieux pour leurs sponsors parce qu’ils apporteront une contribution autrement plus constructive.

Nous ne sommes pas là-haut pour les réseaux sociaux, nous sommes là-haut parce que nous aimons ça. Et aucune personne impliquée dans ce loisir ne peut dire qu’il est différent, qu’il n’agit pas de la sorte. NOUS sommes TOUS dans le même panier.

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