MilkBox Girls, la nouvelle génération de skieuses

Laissez nous vous présenter Addie, Ella et Josie, trois skieuses de la nouvelle génération qui ont fondé MilkBox Girls (MBG) pour partager leur passion et leur style. Elles ont de l’énergie à revendre sur les skis et en dehors, et ont commencé par filmer les expériences et les aventures qu’elles vivaient toutes ensemble. Elles se sont dit qu’il fallait en faire profiter le vaste monde. MilkBox Girls est une démonstration d’amitiés féminines fortes et d’un système de soutien, ainsi que d’une approche amusante d’un monde souvent trop sérieux, en tirant le meilleur parti de chaque instant.  

Qu’est-ce que c’est pour vous les Milkbox Girls ? Ça vient d’où, comment avez-vous fondé ce crew ? 

Ella : Le nom lui-même n’a pas de signification particulière. Il sonnait bien, personne ne l’avait utilisé auparavant et il y avait un fond burlesque, pas sérieux, ce qui était exactement le but recherché.  

Nous nous sommes toutes rencontrées pendant notre première année à l’université d’État du Montana et nous avons commencé à traîner, à faire la fête, à skier et globalement à profiter de la vie ensemble. Nous avons ensuite emménagé toutes les trois en colocation dans une grande maison et nous y avons vécu pendant deux ans.  

Josie : Au départ, on filmait juste nos bons moments à faire les folles et ça a donné une vidéo bien fun qui présentait le crew. Pour moi, MBG représente un environnement réjouissant et encourageant, un groupe de femmes qui aiment s’amuser dehors et encourager d’autres femmes à faire de nouvelles choses, à se planter et à assumer, toujours en se faisant plaisir !  

Quand je faisais du ski plus jeune, j’étais surtout avec des potes masculins, parce qu’aucune de mes amies filles n’était dans ce délire. C’était donc vraiment rafraîchissant et motivant de rencontrer Addie et Ella. La première fois que nous avons skié ensemble, elles pensaient que comme je venais de l’alpin, j’allais être nulle pour skier fun. Elles étaient plutôt effrayées à l’idée de skier avec moi et m’ont dit qu’elles avaient été agréablement surprises, mais elles m’ont toutes les deux raconté ça après coup. 

Addie : J’ai vu le potentiel des filles avec lesquelles je m’étais retrouvée. Elles n’avaient pas peur. J’ai grandi entourée de garçons et j’ai toujours vu cette approche de la vie, mais je l’ai rarement, voire jamais, observé chez des femmes. Elles se jetaient du haut des plus grandes cliffs, lançaient des tricks tête en bas depuis des corde dans la rivière, faisaient du skateboard partout, sautaient des toits. C’était le chaos total, la vie sans règles. Et par règles, j’entends celles que la société impose aux filles de notre âge. Nous devrions passer deux heures à nous préparer pour sortir, puis prendre des selfies pour ensuite rester dans un coin ou s’asseoir et regarder les garçons.  

Je ne dis pas que nous ne prenons pas beaucoup de temps pour nous préparer, et c’est clair qu’on se prend en quand on se trouve belles, mais lorsque nous sortons, que ce soit pour faire du ski ou pour aller à une fête, c’est justement pour faire cela. Pas pour regarder, et on montre bien à ceux qui nous entourent qu’on est pas là pour faire de la figuration. C’est nous que les autres regardent. 

Nous avons toutes des forces et des faiblesses. C’est un très bon équilibre, et c’est parfait pour le ski, parce que si nous étions toutes bonnes dans un seul domaine et qu’aucune d’entre nous ne pouvait faire autre chose, je ne pense pas que nous n’apprendrions pas autant les unes des autres. 

Parlons un peu de vous : comment décririez-vous chacune la skieuse et la femme que vous êtes aujourd’hui ?  

Josie : J’étudie la biologie cellulaire et les neurosciences à la l’Université du Montana de Bozeman, et j’obtiendrai mon diplôme en mai. Je voulais être neurochirurgienne, mais maintenant, je pense m’orienter vers la gynécologie, un domaine en plein essor, et j’aime aussi l’idée de travailler avec des femmes. J’ai grandi à Hood River, dans l’Oregon, où je faisais du kitesurf l’été et du ski l’hiver. Je skiais en club quatre jours par semaine, dont les mercredis et jeudis en nocturne à Mt Hood. Pour ma dernière année, j’ai gagné le championnat d’État de slalom, ce qui était génial pour ma dernière course. 

Je n’avais jamais vraiment skié freeride avant de déménager dans le Montana pour l’université. J’étais trop occupée à m’entraîner pour la compétition et je n’avais jamais vraiment appris les tricks, sauté des barres ou skié des couloirs jusqu’à ce que je découvre le ski à Bridger Bowl.  

Ella : Je suis étudiante en dernière année de génie mécanique. Mes parents ne se contentaient pas de me dire comment faire les choses, ils me laissaient les découvrir et résoudre les problèmes par moi-même. J’ai toujours travaillé dur, ce qui a façonné mon ski car j’ai appris que les choses ne se font pas toutes seules, je savais ce qui me passionnait et j’ai fait en sorte d’y arriver. 

Mes deux parents m’ont inspiré chacun à leur manière. Ma mère était celle qui aimait le plus les activités de plein air, qui faisait du VTT ou qui allait skier toute seule si je n’étais pas disponible. Personne ne pouvait lui dire quoi faire. Elle surpassait mon père à 100 % sur tout ce qui était physique.  

J’ai grandi en faisant du ski à Mt Baker, principalement avec des snowboarders, et j’ai arrêté pendant 3 ans à l’adolescence lorsque j’ai commencé à m’intéresser davantage aux sports scolaires. J’étais à fond dans la gymnastique, je faisais de la danse en compétition, et en plus de tout ça le football. Le ski c’était plutôt un truc de week-end. J’ai commencé à m’y remettre vraiment au cours de ma deuxième année de lycée. Je n’avais jamais fait d’alpin ou de bosses, mais j’aimais essayer de nouvelles figures et m’amuser, en suivant ce groupe de mecs qui aimaient vraiment sauter des barres et envoyer des tricks. Je n’avais pas de formation en ski, je faisais ça quand je pouvais, il n’y avait pas de règles, personne ne nous regardait.  

Addie : Je suis née sur la côte est, dans le Vermont, j’ai déménagé à Jackson Hole quand j’étais très jeune, puis ma mère a trouvé un emploi dans une école privée à Sun Valley, dans l’Idaho. J’ai toujours un garde-meuble ici. Cela fait deux ans que je n’ai pas eu d’endroit stable. Je gare ma voiture chez filles, donc mon truck est à Bozeman et mes affaires à Sun Valley.  

J’ai commencé par le ski de bosses, parce que c’était l’organisation la plus souple à l’époque. Le ski alpin était très strict, il fallait se lever à 6 heures du matin, porter des combinaisons moulantes pour les courses et suivre un programme d’entraînement très rigide. Dans l’équipe de ski de bosses, on allait rider avec les snowboarders, les skieurs de park, il n’y avait aucune discipline jusqu’à ce que je sois un peu plus âgée. Nous étions la seule équipe à subir des tests de dépistage. Je crois que j’ai passé mon premier test de dépistage quand j’étais en CM1. Je me souviens que je paniquais parce que j’avais mangé des graines de pavot la veille et j’avais peur que cela apparaisse comme de la méthamphétamine. 

Qu’est-ce que tu ne pourrais pas faire si tu étais un garçon ? Qu’est-ce qui te rend particulièrement fière ou consciente d’être une fille ? 

Josie : Je pense que les hommes pourraient faire tout ce que les femmes font s’ils avaient la confiance nécessaire. Par exemple, les hommes ne portent généralement pas de vêtements féminins, mais cela ne veut pas dire qu’ils ne peuvent pas le faire.  

Ella : Je ne pourrais pas vivre autant de vies qu’en étant une fille. La dualité féminine est ce qu’il y a de plus beau. Quand on est une fille on peut être gênée par son apparence dans un environnement essentiellement masculin, comme dans mes cours d’ingénierie ou sur la neige. Soit on est bien apprêtée et on a l’air de se soucier trop de son apparence et on est considérée comme un objet, soit on porte des vêtements amples et on se fait traiter comme un garçon manqué. 

Le genre est un sujet très important dans le monde d’aujourd’hui. J’y pense beaucoup parce que je me retrouve dans beaucoup de domaines dominés par les hommes. Je suis étudiante en génie mécanique en dernière année et mes classes sont composées à 90 % d’hommes, je suis constamment entourée d’une énergie masculine très intense.  

Le fait d’être une femme dans un secteur dominé par les hommes constitue sans aucun doute un obstacle de taille à surmonter, mais il y a aussi beaucoup d’avantages. 

Addie : Je pense qu’aujourd’hui, il est de plus en plus normal que les garçons souffrent des mêmes insécurités que les filles. J’ai souvent souhaité être un mec dans ma vie, mais ces dernières années je n’y ai pas pensé une seule fois. Les femmes sont en train de tout déchirer et de prouver leur supériorité jour après jour. J’ai toujours pensé que les mecs avaient la vie plus facile, jusqu’à ce que je trouve un crew de filles qui m’a complètement prouvé le contraire. J’enviais le fait que les choses semblaient plus faciles pour les mecs lorsqu’il s’agissait de progresser, en particulier en ski. Mais je pense que quand tu as une équipe solide qui te soutiens et qui a confiance en tes capacités, cela se sent et tu progresses plus rapidement. 

Quelles sont les questions ou remarques les plus stupides que vous ayez entendues en tant que fille pratiquant un « action sport » ? 

Addie : La classique : « C’était énorme ! *pause* Pour une fille… » Pour être tout à fait honnête, je l’ai déjà dit moi-même. Je l’ai dit à propos de ma propre progression à de nombreuses reprises. C’est de l’autodérision, et je fais attention à ne plus tomber dedans. Je pense que le besoin d’ajouter « pour une fille » à la fin d’une phrase est inutilement négatif.  

Josie : « Tu skies bien pour une fille », « C’est l’un des backflips les plus fous que j’ai vu faire par une fille », et « vous montez à trois sur la motoneige ? » 

Ella : « Qui est la meilleure skieuse de ton crew ? » CE N’EST PAS UNE COMPÉTITION, je suis tellement fatiguée des gens qui essaient constamment de classer les femmes dans le ski, comme s’il devait y en avoir une au sommet et que les autres n’étaient pas aussi bonnes et ne méritaient pas de prendre de la place. C’est fou le nombre d’hommes qui skient, et il est évident qu’ils ont tous leur propre style, leurs propres qualités et leurs propres compétences, et personne n’essaie de les classer. Pour une raison ou une autre, parce qu’il y a moins de femmes que d’hommes dans le ski, les gens veulent savoir qui est au sommet et ne mettent en avant que ces personnes, comme si les autres n’étaient pas dignes.  

Vous portez indistinctement des vêtements hommes et femmes, en quoi cela correspond-il à votre propre style ?  

Addie : En général, je ne supporte pas la façon dont les vêtements féminins sont ajustés. Cela va au-delà du ski. Je porte surtout des vêtements d’homme. Cela dit, il y a beaucoup de filles et de femmes qui aiment les vêtements pour femme et je respecte, je pense que c’est tout à fait normal. 

L’un des éléments que je préfère dans le sport, en dehors de l’action elle-même, c’est de voir les tendances et le style changer et se développer, revenir à l’ancien et de se projeter dans l’avenir, tout cela en même temps. 

Josie : Je n’aime pas sentir mes vêtements trop serrés contre moi lorsque je fais une activité qui implique beaucoup de mouvements. Je pense qu’à l’instar des danseurs de hip-hop qui portent des vêtements amples, cela permet d’avoir un peu plus de style en skiant.  

Ella : J’ai tendance à ne porter que des vêtements masculins, principalement en raison de leur forme et de la façon dont ils tombent. Je déteste me sentir serrée et le fait de porter des vêtements masculins permet d’éviter cela. Je n’ai pas de préférence pour les couleurs, j’opte pour ce qui attire mon attention, donc les motifs/couleurs féminins ou masculins sont tous valables lorsqu’il s’agit de choisir ma tenue.  

Je connais beaucoup de filles qui font de même, surtout là où nous vivons, dans le Montana, où il est très courant que les femmes portent des vêtements de ski masculins.  

Ce n’est pas une façon de s’affirmer, c’est juste le fait qu’ils nous vont beaucoup mieux et que nous voulons porter des vêtements amples. Cela peut aller dans les deux sens, il y a beaucoup d’hommes qui veulent porter des vêtements plus ajustés ou des couleurs féminines, et c’est cool. 

Il y a un mouvement vers des vêtements outdoor non genrés ce qui, je pense, est la prochaine étape pour que le monde du ski devienne plus une grande communauté que quelque chose d’inutilement divisé en deux.  

Je ne pense pas qu’il devrait y avoir de genre sur les étiquettes, on pourrait simplement se baser sur la façon dont ils s’adaptent à chacune et chacun, parce que lorsqu’on met des labels en fonction du sexe, cela rend les choses inconfortables pour le sexe opposé.  

Y a-t-il une différence entre le ski masculin et le ski féminin ? 

Addie : Il faudrait être aveugle et tout simplement stupide pour ne pas penser qu’il y a une différence entre les hommes et les femmes dans n’importe quel type de sport d’action. Il suffit de regarder ce que je fais sur le Freeride World Tour, regarder les hommes et les femmes, ils ne sont pas comparables, mais je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose. 

Ce que je trouve le plus intéressant, c’est la progression. Le sport atteint un tel niveau d’excellence que les trajectoires des hommes et des femmes pointent droit vers le haut, pas sur la même voie certes, mais je ne serais pas surprise, après avoir vu ce que fait la jeune génération, que ces lignes commencent à se croiser dans les dix prochaines années. 

Je peux skier avec un gars et faire des choses qu’il ne peut pas faire parce qu’il est plus grand, mais il peut ensuite faire un énorme road gap que je ne suis pas capable de faire parce que je n’ai pas assez de vitesse.  

Je pense que c’est super cool d’être sur la voie que j’ai empruntée dans le ski féminin, et toutes celles qui progressent dans ce sport devraient être fières parce qu’elles y contribuent. 

Mais comparer les hommes et les femmes n’apporte pas grand-chose pour le sport, cela ne fait qu’engendrer des conflits.  

J’ai grandi en ne skiant qu’avec des hommes, et nous ne nous arrêtions jamais, c’était toujours à qui va jumper le plus gros, skier le plus vite. J’ai fait des choses que je n’aurais peut-être pas faites autrement. Mais en skiant avec des filles, on progresse différemment, parce qu’on peut se concentrer davantage.  

Ella : Il est indéniable que les hommes naissent avec de la testostérone et la capacité d’avoir une plus grande force naturellement, ce qui se traduit ensuite par une capacité à skier plus fort, dans la plupart des cas. 

Si nous parlons du ski en tant qu’expérience, je ne vois pas de différence, le ski peut apporter autant de joie, d’ancrage, de sens de la communauté et de sérénité aux hommes qu’aux femmes, et si vous voulez mon avis, c’est la seule chose qui compte… 

Une partie de la raison pour laquelle il peut être effrayant ou intimidant pour une femme de se mettre en avant dans l’industrie du ski, c’est parce qu’elle reçoit beaucoup d’attention, parce que les gens sont tellement habitués à ce que les femmes soient ennuyeuses. Les runs de compétition n’étaient pas jugés aussi excitants à regarder, alors si vous vouliez de l’action, il fallait regarder les hommes. J’ai été victime de cette mentalité en grandissant.  

Mais plus récemment, avec la progression, les médias et l’inspiration, l’attention s’est accrue, et c’est pourquoi nous progressons à un niveau plus élevé. 

Il est important de mettre en avant plus de femmes, même si elles ne font rien de fou, parce qu’il y a des centaines et des milliers d’hommes qui sont mis en avant chaque jour pour avoir fait des choses que beaucoup de femmes peuvent aussi faire, et je pense que le rapport est un peu biaisé. 

Josie : Les différences physiques sont indéniables. On peut voir une différence dans le niveau de tricks sur des compétitions telles que les X-Games, mais c’est fou de voir à quelle vitesse le fossé se réduit. Il y avait auparavant une différence beaucoup plus importante, mais cette année en particulier ça a vraiment évolué, avec le premier triple féminin par exemple. C’est génial et très motivant pour toutes les filles de l’industrie.  

Je pense qu’il existe des stéréotypes, mais là encore, cela commence à s’estomper car les femmes se surpassent et font passer le ski féminin au niveau supérieur. 

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